La brit(t)onicitas, si du moins elle existe, ne saurait se réduire aux possibles «brit(t)onismes» supposés parsemer la production hagiographique bretonne continentale, dont la recherche s’est révélée au demeurant assez décevante, ni même à la fameuse garrulitas britannica, qui rend confusa et conséquemment pesantes à leurs lecteurs (ut legentibus fierent onerosa), les gesta de saint Paul Aurélien, comme le déplore au XIe siècle Vital, moine de Fleury, dans la préface de sa réfection de l’ouvrage daté 884 de son lointain prédécesseur, Wrmonoc, moine de Landévennec : cette définition d’un «genre d’expression inusité, qui détournait de la lecture jusqu’aux gens d’études eux-mêmes» (inauditum locutionis genus quoque studiosos a lectione summovebat) a été jugée généralement assez exacte, quoique sévère.

Au-delà de la formule, qui a fait largement florès, c’est la préface de Vital dans sa totalité qui doit être prise en considération, car elle donne à voir en lui le type même du connaisseur de la brit(t)onicitas, qui s’efforce, avec un incontestable savoir-faire, d’en lisser les aspérités les plus saillantes : ce qui paraît impliquer que nous avons affaire tout à la fois à un Breton et à un véritable écrivain ; mais, pour autant, faut-il reconnaître dans cet auteur l’hagiographe de Gildas, comme l’ont soutenu successivement des chercheurs tels que Theodor Mommsen, Ferdinand Lot, et plus récemment John M. Howe et Bernard Tanguy ? François Duine autrefois, Bernard Merdrignac et Joseph-Claude Poulin depuis, ont montré beaucoup plus de circonspection quant à une telle identification, que certains aspects stylistiques, en dehors même de toute référence au «latin brit(t)onique», incitent à révoquer en doute.

La brit(t)onicitas existe-t-elle en dehors des imprécations de ses contempteurs ? C’est à cette question que le présent blog, à la suite des travaux de nombreux spécialistes, ambitionne d'apporter, sous forme exemplaire, quelques réponses particulières puisées aux sources hagiographiques de la Bretagne continentale.



jeudi 21 décembre 2023

Avis aux chercheurs : mise en ligne d'un manuscrit d'une importance exceptionnelle pour l'historiographie bretonne médiévale

Le fameux ms Rennes, Archives départementales d’Ille-et-Vilaine – « fameux » car ce recueil de notes de la fin du XVe siècle est au centre de plusieurs polémiques dans lesquelles s’est illustrée jadis la mauvaise foi d’Arthur de la Borderie[1] – est désormais accessible et téléchargeable en ligne ici.   

Formons le vœu que cette mise à disposition, dont il faut remercier et féliciter les archives brétilliennes, encourage les chercheurs (universitaires, indépendants, étudiants, érudits) à procéder à la transcription du contenu du manuscrit et à son étude approfondie. Voir pour le moment le travail de Mme Louise Stephens publié en ligne ici, qui constitue, nous semble-t-il, le dernier état de la question.



[1] André-Yves Bourgès, Le dossier littéraire de saint Goëznou et la controverse sur la Vita sancti Goeznovei, Morlaix, 2020, p. 66-83.


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